Nice : Sous les ors du Chantecler : Deux cheffes étoilées pour une mémoire partagée
- alainangenost
- 9 juil.
- 3 min de lecture

C’est dans l’univers du Negresco que s’est dessiné un véritable événement : une série de dîners à quatre mains, initiée par la cheffe étoilée Virginie Basselot, Meilleur Ouvrier de France, marquant une première dans son parcours à la tête du Chantecler.
Pour célébrer cette nouvelle aventure, elle avait convié Jacques Maximin, lui aussi M.O.F., figure emblématique du Chantecler, où il fut en 1980 le premier chef à décrocher deux étoiles Michelin dans un palace. Ce retour a été empreint d’émotion, renouant avec les racines du lieu et célébrant la transmission et l’excellence artisanale.
Le 28 juin, Virginie Basselot accueillait à son tour Eugénie Béziat, cheffe du restaurant l’Espadon au Ritz Paris, fraîchement étoilée en mars 2024. À travers ce duo complice de muses du goût, la cuisine est devenue langage de mémoire et d’émotion. D’un côté, les saveurs normandes revisitées sous le ciel niçois ; de l’autre, les réminiscences africaines qui nourrissent une inspiration empreinte d’épices, d’émotion et de mémoire vive.

Virginie Basselot compose sa cuisine comme on écrit un carnet de voyage : chaque plat raconte une escale entre deux terres chères à son cœur. De la Normandie, elle puise l’essence brute, les produits francs et généreux ; de la Riviera, elle capte la lumière, les fragrances iodées et les accents méditerranéens.
La cuisine d’Eugénie Béziat est un souffle libre, nourri par une mémoire vibrante et un imaginaire en mouvement. Marquée par son enfance africaine et ses nombreux voyages, elle compose des assiettes sincères et lumineuses, où chaque saveur semble porter un éclat d’histoire et d’émotion.
Le menu fut une exploration sensorielle en cinq tableaux, chacun comme une page tournée dans l’atlas gustatif des deux cheffes.
Le bal s’ouvrit sur les coquillages de Méditerranée, relevés d’angélique et de livèche, servis avec un condiment pili-criste marin, comme un hommage aux rivages et à la fraîcheur des premières notes. Suivirent les légumes et le basilic des producteurs locaux, en évocation d’une soupe au pistou, où l’ail et le parmesan dialoguent dans une simplicité jubilatoire. Le maquereau bleu azur, travaillé en escabèche, fit entendre une facette anisée, les tanins délicats d’un cassis d’été et la torréfaction subtile d’un grain de café de São Tomé, audacieux et magnifiquement équilibré. En cœur de menu, le denti de Méditerranée s’accordait aux haricots verts d’ici, dans un velouté d’herbes au vinaigre et ail noir, mêlant fraîcheur, tension et profondeur. Enfin, la ventrèche de cochon Ibaïama clôturait ce parcours sur l’idée d’un gras noble, enfleuré à la rose Centifolia, avec une pastèque concentrée et un poivre Tellicherry pour souligner la douceur, le piquant et la maîtrise.
Les notes sucrées vinrent clore cette symphonie à quatre mains dans un éclat de sensualité maîtrisée. Les fraises de Villeneuve-Loubet, relevées d’un piment d’Amazonie, se sont habillées de blanc en neige et de feuillage croustillant, jouant l’audace sur la fraîcheur. Puis l’ultime bouchée : une alvéole croustillante aux miels de Corse et Madagascar, enveloppant l’amande et l’orange confite, dans l’esprit raffiné et gourmand d’un florentin réinventé.
Ce second dîner à quatre mains fut bien plus qu’une rencontre gastronomique : une œuvre partagée, où le terroir est devenu récit, et le goût, une signature profondément personnelle.

Le Chantecler au Negresco
37, promenade des Anglais 06000 Nice
Tél. 04 93 16 64 10
Menus : 210, 280 €
Carte : 220€
Horaires : 19h-21h30
Fermeture hebdo. : lundi et mardi.
Commentaires